Rapport sur le nucléaire : « Sa renaissance est un fantasme et une propagande »
par Geoffrey Le Guilcher le 16 juillet 2013 à 15h59
Le World Nuclear Industry Status Report 2013 a été présenté au Parlement européen jeudi 11 juillet. Ce rapport constate une industrie nucléaire en déclin au niveau mondial, pointe ses incohérences financières et revient sur la situation actuelle dans le Japon post Fukushima. Entretien avec Mycle Schneider, auteur principal du rapport et consultant indépendant en énergie et politiques nucléaires.
Quel est l’objet de votre rapport ?
Son objectif est de fournir une analyse mondiale de l’industrie du nucléaire et d’éclairer des chiffres qui sont a priori publics d’un point de vue « hors lobby ». On a commencé ça en 1992, c’est la huitième édition. Ça se veut un rapport d’analyse de tendances. On peut discuter éternellement de chaque chiffre, mais pas des tendances évidentes.
Quels sont vos critères d’analyse ?
Notre analyse porte sur de nombreux paramètres : le nombre de réacteurs et leur capacité en fonctionnement, ceux en construction, ceux arrêtés, l’âge des réacteurs, etc. A partir de 2009, on a rajouté des données économiques. Depuis deux ans, on prend aussi en compte la comparaison avec la montée en puissance des énergies renouvelables ; l’année dernière, on a élargi avec des données financières, comme les notations des grandes entreprises nucléaires par les agences telles que Standard & Poor’s ; et cette année, pour la première fois, on fournit un état des lieux sur Fukushima.
Quels sont vos sources ?
On prend les chiffres de l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique), de gouvernements et d’une grande quantité de sources variées (le rapport compte plus de 600 notes de bas de page – ndlr) mais on y met notre grain de sel. Par exemple, la date d’arrêt des réacteurs est un enjeu évident. Aux Etats-Unis, quatre réacteurs ont été officiellement arrêtés cette année. Mais deux d’entre eux n’ont pas fonctionné du tout depuis début 2012. l’AIEA attend la décision politique d’arrêt définitif (prise en 2013) pour les comptabiliser comme arrêtés. Nous préférons nous baser sur le fonctionnement réel des installations, donc nous les considérons comme arrêtés dès 2012. Autre exemple au Japon. Selon l’AIEA, il reste officiellement 50 réacteurs en fonctionnement. En réalité, depuis un an, il n’y en a que 2 sur 50 qui produisent effectivement de l’électricité.
Votre constat global, c’est un déclin de l’industrie nucléaire ?
Absolument. Un déclin commencé depuis de nombreuses années sur un nombre de critères très importants. Par exemple, la part du nucléaire a atteint son maximum historique avec 17%, il y a déjà 20 ans, et il est descendu à environ 10% en 2012. La chute s’est accélérée avec Fukushima.