22 August 2020

Le Figaro (France)

La première centrale nucléaire du monde arabe entre en service à Abu Dhabi

Construit par le sud-coréen Kepco, préféré aux français, le premier des quatre réacteurs a démarré.
Source : La première centrale nucléaire du monde arabe entre en service à Abu Dhabi https://www.lefigaro.fr/flash-eco/emirats-la-centrale-nucleaire-de-barakah-connectee-au-reseau-electrique-20200819

Par Fabrice Nodé-Langlois

Publié le 19 août 2020 à 10:53, mis à jour le 19 août 2020 à 20:28

Lorsqu’ils seront pleinement opérationnels, les quatre réacteurs de la centrale de Barakah produiront 25% des besoins du pays. - / AFP

C’est une étape historique qui a été franchie mercredi dans le golfe Arabo-Persique. En injectant ses premiers kilowatt­heures dans le réseau électrique, le réacteur de Baraka est devenu la première centrale nucléaire en service dans le monde arabe. Baraka-1, situé dans l’ouest de l’émirat d’Abu Dhabi, est le premier des quatre réacteurs qui doivent démarrer dans les prochaines années et fournir, ensemble, un quart des besoins en électricité des quelque 9 millions d’habitants des Émirats arabes unis (EAU).

Pour l’industrie atomique française, l’entrée en service de Baraka ravive le souvenir amer d’une défaite. En décembre 2009, « l’équipe de France du nucléaire » qui négociait la vente de quatre réacteurs EPR avait finalement été écartée au profit du sud-coréen Kepco, qui signait à cette occasion son premier contrat à l’export. À l’époque, il avait été reproché au consortium tricolore formé par EDF, GDF Suez, Areva, et Total (bien implanté dans l’émirat) de n’avoir pas joué assez collectif et sans capitaine bien identifié. Surtout, les Coréens proposaient leur centrale bien moins cher : environ 5 milliards de dollars par réacteur contre 6,5 milliards par EPR, selon les chiffres évoqués alors.

Comme dans la plupart de ces chantiers pharaoniques, le budget comme le calendrier de Baraka ont dérapé. Le World Nuclear Industry Status Report du consultant indépendant Mycle Schneider cite un chiffre de 24,4 milliards de dollars (contre 20 milliards prévus) et rappelle qu’initialement, le premier réacteur devait entrer en service au printemps 2017. Ambitions égyptiennes et saoudiennes

C’est donc avec trois ans de retard que les Émirats arabes unis rejoignent le club des puissances nucléaires civiles, qui compte désormais 32 pays, selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Si Baraka est bien la première centrale atomique à produire de l’électricité dans un pays arabe, elle n’est pas la seule dans la région sous tension qu’est le Moyen-Orient. Sur l’autre rive du Golfe, le réacteur de Buchehr, construit par les Russes en Iran, fonctionne depuis 2011.

Deux autres pays arabes sont bien engagés dans des programmes nucléaires. L’Égypte semble le plus avancé. Un accord a été signé avec le russe Rosatom en 2015 pour la fourniture de quatre réacteurs. Le président de l’Agence égyptienne des centrales nucléaires a annoncé mardi que le permis de construire du premier réacteur, à Dabaa, sur la côte méditerranéenne, devrait être délivré au premier semestre 2021.

L’Arabie saoudite, quant à elle, a annoncé dès 2011 sa volonté de construire pas moins de 16 réacteurs atomiques. Si cette ambition s’inscrit désormais dans le projet de diversification économique du royaume, Vision 2030, impulsé par le prince héritier Mohammed Ben Salman, elle ne s’est guère encore concrétisée. Des accords de coopération ont été signés entre Riyad et la France, la Russie, la Chine et la Corée du Sud, pointe le rapport de Mycle Schneider. Mais aucun appel d’offres pour la construction d’un premier réacteur de production d’électricité n’a encore été lancé. Les Émirats devraient rester un moment la seule puissance nucléaire arabe.

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